Macroalgues dans le Parc : état écologique et exploitation
Les algues de rives sur les estrans rocheux représentent un habitat à enjeu majeur de préservation pour le Parc ainsi qu'une ressource exploitée par des professionnels récoltants d'algues de rives du territoire. Depuis le 5 août 2020, l'arrêté préfectoral n° 181 règlemente cette pratique professionnelle en Charente-Maritime. Afin d'assurer un suivi et une évaluation de l'état des peuplements de macroalgues et des stocks exploités, le Parc a mené une étude avec le soutien du Centre d'étude et de valorisation des algues (CEVA) et en collaboration avec les partenaires locaux : l'association OBIOS, le CPIE Marennes-Oléron, le Centre pour l'Aquaculture, la Pêche et l'Environnement de Nouvelle-Aquitaine CAPENA, des scientifiques, les exploitants et les services de l'État (DDTM, DIRM*).
*DDTM : Direction Départementale des Territoires et de la Mer / DIRM : Direction Interrégionale de la Mer
Particularité du Parc naturel marin vis-à-vis des macroalgues
Sur les plus de 6 500 km² de superficie totale du Parc naturel marin, les estrans rocheux couvrent 460 km². Les macroalgues sur ces estrans rocheux occupent une surface de 53 km² (projet CartoHECo).
Le territoire du Parc est une zone de transition particulièrement intéressante à étudier à l'échelle de la façade Atlantique, avec au nord, des zones très riches en algues sur l'estran (Bretagne) et, au sud, des côtes plus sableuses, moins riches en macroalgues (Pays Basque).
Les estrans du Parc sont relativement plats ou peu pentus, ce qui influence la distribution des communautés algales. Les algues rouges se trouvent principalement en bas d'estran, tandis que les algues vertes occupent le haut. Les algues cohabitent avec d'autres organismes comme les huîtres, les moules et les hermelles, créant une riche biodiversité.
Projet EVALG : Évaluation et gestion des macroalgues
Le projet EVALG (EValuation de l’état écologique et des stocks de macroALGues) vise à améliorer la connaissance sur l’état écologique de ces macroalgues et à accompagner le développement d’activités humaines respectueuses. Ce projet de recherche et développement (2020-2024) a pour objectif de développer des protocoles et des indicateurs pour évaluer l'état écologique et les stocks de macroalgues dans le Parc. Ce projet a permis de créer une communauté de travail collaborative.
Les objectifs spécifiques du projet ont été de :
- Synthétiser les données scientifiques, réglementaires et professionnelles existantes sur les macroalgues,
- Caractériser l’exploitation professionnelle des macroalgues via des enquêtes auprès des récoltants et des données collectées depuis 2016,
- Élaborer et mettre en œuvre deux protocoles scientifiques pour mieux connaître les peuplements d’algues sur 28 sites d’échantillonnage et évaluer les stocks exploités ainsi que l’impact de cette exploitation,
- Proposer des recommandations pour un guide de bonnes pratiques de récolte.
Bilan du projet
Depuis 1976, 221 espèces d'algues ont été identifiées sur le territoire du Parc. La récolte des algues, réglementée différemment entre la Charente-Maritime et la région Pays-de-la-Loire, nécessite une autorisation annuelle et une déclaration des collectes (date, localisation, biomasse).
Depuis 2016, cinq récoltants professionnels, principalement pour un usage alimentaire, opèrent dans le Parc, avec des pics de récolte entre avril et août. Seize espèces de macroalgues sont récoltées sur treize secteurs différents. Entre janvier 2016 et juin 2023, les espèces les plus récoltées sont Ulva spp. (3,7 ± 2.4 tonnes/an), Porphyra spp. (1,6 ± 1,2 tonnes/an), et Undaria pinnatifida (1,4 ± 0,5 tonnes/an).
Des enquêtes menées par CAPENA ont montré que 42 % des 109 ostréiculteurs interrogés ramassent ou achètent des algues, principalement pour la conservation des huîtres, avec une moyenne de 370 kg d'algues fraîches récoltées par entreprise et par an. Le ramassage totalise 51,7 tonnes/an, dont 44 tonnes par les ostréiculteurs et 7,7 tonnes par les récoltants professionnels.
La caractérisation des communautés de macroalgues (à partir de 33 transects répartis sur 28 sites) a révélé une grande variabilité liée aux substrats et conditions environnementales. Les algues brunes sont peu représentées, contrairement aux algues rouges. Le suivi des biomasses a montré la nécessité d’une récolte raisonnée pour préserver les stocks, notamment pour les fucales (algues brunes), en déclin à cause du réchauffement des eaux.
Recommandations pour la récolte durable
Les données ont permis de formuler des recommandations pour un guide de bonnes pratiques :
- Ne pas récolter l’entièreté d’un champ, privilégier une récolte par patch
- Ne pas racler le substrat avec l’outil de récolte
- Éviter de récolter l’intégralité d’un plant
- Ne pas récolter d’algues échouées ou dérivantes pouvant être contaminées
- Remettre les rochers en place après la récolte
Et après ?
Les premiers résultats sont cruciaux pour faire progresser la thématique selon plusieurs axes :
- Surveiller l’état écologique des champs de macroalgues sur les estrans rocheux du Parc, en appliquant un protocole préalablement développé et testé,
- Cartographier les champs de fucales en déclin, calculer le taux d’exploitation et promouvoir une évolution réglementaire pour les algues brunes (notamment en termes de protection et de réglementation de la récolte professionnelle),
- Suivre les récoltes mensuelles déclarées par les récoltants professionnels,
- Créer un guide de bonnes pratiques de récolte,
- Sensibiliser les ostréiculteurs et plaisanciers aux résultats et aux bonnes pratiques et,
- Former à l’identification des macroalgues afin de garantir la pérennité de la communauté de travail et son organisation autour de cette thématique au sein du Parc.
Les premières recommandations seront consignées et développées dans un guide destiné aux récoltants professionnels, conchyliculteurs et pêcheurs à pied, dans le but de promouvoir des pratiques respectueuses de l'environnement et durables pour la gestion des ressources algales dans le Parc. Ces recommandations pourraient également conduire à des évolutions réglementaires.