D’où proviennent les déchets échoués sur le littoral ?

11 mars 2025

L’OFB a confié la mission d’identification de l’origine des déchets retrouvés sur le littoral (projet ORDECH - (Origines des déchets) au Centre de documentation, de recherche et d’expérimentations sur les pollutions accidentelles des eaux (CEDRE). L’étude réalisée sur 4 Parcs naturels marins (Estuaire de la Gironde et mer des Pertuis, Bassin d’Arcachon, Iroise et Mayotte) nous livre les principaux résultats obtenus dans le périmètre du Parc en mettant en lumière l’origine, les activités génératrices de déchets et les voies de transfert.

Identification des déchets échoués
Identification des déchets échoués

Cécile Barreaud / OFB

Quels sont les sites de surveillance choisis pour l’étude ?

Les échantillons de déchets utilisés pour cette étude, ont été prélevés sur 6 sites parmi les 11 sites de surveillance des macrodéchets échoués sur les plages du Parc naturel marin pour la Directive Cadre Stratégie du Milieu Marin (DCSMM). Les déchets prélevés dans ce cadre, ont été conservés pendant une année entière (sur 4 saisons de ramassage) afin d’être analysés.

Quelles sont les sources potentielles ?

La synthèse des connaissances sur les divers facteurs hydrodynamiques et activités anthropiques qui caractérisent le Parc naturel de l’estuaire de la Gironde et la mer des Pertuis, a permis de dresser une liste de 15 sources potentielles de déchets échoués sur les plages.

Les déchets collectés passés à la loupe !

Entre janvier 2022 et janvier 2024, un total de 6 989 déchets a été collecté sur les 6 sites de surveillance retenus pour cette étude. Sur ce total :

  • 3 933 déchets ont pu être formellement identifiés
  • 3 056 déchets était des fragments de plastique non identifiables


Seuls les déchets identifiables ont été pris en compte dans les analyses, représentant 56 % du total des déchets prélevés.

Les 5 principales catégories de déchets retrouvées dans le Parc sont :

  1. Les collecteurs à naissains pour l’ostréiculture, soit 13 % (512 déchets)
  2. Les filets et morceaux de filets pour la pêche, soit 10,8 % (425 déchets)
  3. Les déchets issus de la mytiliculture, soit 9,2 % (360 déchets)
  4. Les déchets issus de l’ostréiculture (hors collecteurs à naissains), soit 8,6 % (338 déchets)
  5. Les emballages alimentaires type confiseries, paquet de chips, etc., soit 3,5 % (314 déchets)
     

L’expertise des déchets a permis de collecter les informations suivantes

  • 1 % des déchets (soit 35 déchets sur 3 933) caractérisés présentaient des biosalissures (algues, coquillages ou petits crustacés) témoin de leur séjour prolongé en mer
  • 1,1 % des déchets (soit 44 déchets sur 3 933) possédaient une date de péremption allant de 1986 à 2024, avec une majorité de dates postérieures à 2020 (25 déchets)
  • 4 % des déchets (soit 154 déchets sur 3 933) avaient des inscriptions lisibles, en Français (93 déchets), en Espagnol (27 déchets) et en Anglais (12 déchets) principalement. Mais aussi plus rarement, en Mandarin, Allemand, Italien, Ukrainien, Arabe, Portugais, Russe et Suédois (22 déchets au total)
  • 5,5 % des déchets (soit 216 déchets sur 3 933) appartenaient à une marque commerciale, avec sur le podium « Kinder » et « Mars » (20 déchets), « Cristalline » et « Evian » (20 déchets) et « Coca-cola » (avec 7 déchets). 
     

Les sources identifiées

Les résultats montrent une majorité de déchets d’origine maritime soit 61 % contre 39 % d’origine terrestre.

Les principales activités à l’origine des déchets retrouvés sur nos plages sont :

  • La conchyliculture (ostréiculture et mytiliculture) à 29 %
  • Les activités de tourisme et de loisirs (hors plaisance) à 19 %
  • La pêche professionnelle à 15 %
  • Les activités caractéristiques des centres urbains (les ménages, les réseaux d’eau usée et pluviale, la gestion et la collecte des déchets), contribues à 12 %
  • Le commerce maritime à 11 %
     

Les résultats à l’échelle des sites de surveillance

Les résultats varient en fonction des différents sites étudiés selon leur exposition aux influences océaniques ou fluviales et aux activités anthropiques :

  • La Pointe d’Arçay, proche des zones de production de moules de bouchot, est majoritairement marqué par des déchets d’origine mytilicole (32 %)
  • Les Trois Pierres, sur la façade Ouest de l’île d’Oléron, exposé aux courants marins, est dominé par des déchets issues de la pêche professionnelle (28 %) et du trafic maritime (19 %)
  • Moëze-Oléron, abrité des courants marins par l’île d’Oléron et proche des zones de production d’huîtres, présente des déchets majoritairement d’origine ostréicole (58 %)
  • La baie de Talmont, sous l’influence fluviale de la Gironde, présente des déchets majoritairement d’origine terrestre et caractéristiques des centres urbains (les ménages à 40 % et la gestion des déchets à 36 %)
  • La Maison de Grave, grande plage très fréquentée pour le tourisme balnéaire, est caractérisée par des déchets issus majoritairement des activités de tourisme et de loisirs (43 %)
  • La flèche sableuse de Bonne Anse, à la fois soumise aux influences maritimes et fluviales, montre des déchets d’origine maritimes (56 %) et terrestres (42 %), avec des proportions de sources d’activités comparables à celles observées globalement à l’échelle du Parc (16 % issus de l’ostréiculture, 16 % du trafic maritime, 13 % de la pêche professionnelle, 13 % des activités de loisirs et 14 % des centres urbains).

 

Ces résultats : une aide à la décision et des pistes d’action

L’étude menée dans le cadre du projet ORDECH a pour but d’aider à la prise de décision afin de réduire la pression générée par l’émission de déchets en mer. Quelques pistes d’actions ont été identifiées :

  • Accompagner la profession conchylicole vers l’amélioration des pratiques afin de limiter les pertes de poches, coupelles ou élastiques conchylicoles dans l’environnement. Poursuivre les efforts de sensibilisation, trouver des alternatives durables et respectueuse du milieu marin aux matériaux utilisés, nettoyer et réhabiliter les fermes aquacoles abandonnées
  • Sensibiliser les professionnels de la pêche et mettre en place des outils pour encourager à des pratiques plus durables (tel que le ramassage systématique des bouts de ramendage) au travers d’une charte « pêcheurs partenaires » comme au Parc naturel marin d’Iroise par exemple.
  • Renforcer les réglementations au niveau national ou international, en augmentant les contrôles de la gestion des déchets à bord des navires de commerce. (Par exemple : L’Annexe V de la Convention internationale MARPOL, qui interdit le rejet des déchets en mer, fournie déjà un cadre pour soutenir ces efforts).
  • Améliorer la gestion des déchets sur les centres urbains (qu’ils soient littoraux ou situés plus en amont) avec par exemple : le retrait des poubelles proches des cours d’eau ou des ouvrages de protection (digues, ponton d’accostage dans les ports, etc.), afin d’éviter leur transfert directement dans l’environnement en cas de débordement ; l’installation de dispositifs d’interception des déchets dans des zones de fuites identifiées.
  • L’érosion des côtes et des berges expose les anciennes décharges littorales et fluviales, représentant une source de pollution. Un recensement détaillé de ces sites (en complément de l’inventaire déjà réalisé par le BRGM) permettrait de planifier des actions de gestion et de restauration sur le long terme. Des opérations de réhabilitation ont déjà été lancées, comme à Fouras sur l’ancienne décharge de Pré-Magnou et à Ouessant dans le Parc naturel marin d’Iroise par exemple.
     

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