Conseil de gestion du 16 décembre 2022

16 décembre 2022

Le 16 décembre 2022, s’est tenu le dernier conseil de gestion de l’année à La Rochelle. À cette occasion, les membres du conseil ont rendu un avis conforme favorable, assortis de réserves et prescriptions, sur la demande d’autorisation décennale de dragage d’entretien du Grand port maritime de La Rochelle. Ils ont également décidé de proposer qu’un secteur du Parc soit reconnu en l’état comme zone de protection forte.

Conseil de gestion du 16 décembre 2022 à La Rochelle
Conseil de gestion du 16 décembre 2022 à La Rochelle

Cécile Barreaud / OFB

Avis conforme portant sur la demande d’autorisation environnementale relative au dragage d’entretien de Port Atlantique La Rochelle (PALR)

Les dynamiques sédimentaires, un facteur essentiel du fonctionnement du système Gironde-Pertuis
Les dynamiques hydro-sédimentaires sont essentielles au fonctionnement des écosystèmes. Qu’ils soient au fond de l’eau ou en suspension, les sédiments jouent un rôle fondamental dans la constitution d’habitats, en particulier pour les espèces benthiques. Leur composition, leur qualité et leur répartition sont déterminantes pour les écosystèmes.

Les baies envasées des pertuis sont des milieux offrant des fonctions écologiques essentielles à l’échelle du Parc. À marée basse comme à marée haute, les vasières constituent des zones d’alimentation de nombreux animaux et présentent d’importantes fonctions de nourriceries pour les poissons. Elles sont aussi le support biologique et physique des activités primaires que sont en particulier la conchyliculture ou la pêche maritime professionnelle.

Les activités de dragage et d’immersion des sédiments peuvent altérer les habitats benthiques et leurs fonctionnalités.

Le Parc naturel marin a une responsabilité forte de préservation de la qualité de l’eau et des sédiments, des habitats, des espèces et des fonctionnalités associées (frayères, nourriceries…), enjeux définis dans son plan de gestion.

Le projet de Port Atlantique La Rochelle (PALR)
Pour maintenir les profondeurs nécessaires à l’exploitation des installations portuaires sur l’ensemble de son site, le Grand port maritime de La Rochelle a déposé une demande d’autorisation environnementale pour le dragage d’entretien du port et le clapage des sédiments sur la zone du Lavardin pour une durée de 10 ans. Cette zone, utilisée pour l’immersion des sédiments depuis 1965, reçoit également une partie des sédiments dragués dans le port de plaisance de la Rochelle et dans le port de pêche de Chef de Baie.

Zones, volumes dragués et secteur d’immersion
Jusqu’en 2023, le PALR dispose d’une autorisation de dragage d’entretien maximum annuelle de 300 000 m3. Sur les dix années d’autorisation, le volume annuel moyen de dragage ne devait pas dépasser 250 000 m3. 

La nouvelle demande du port concerne le dragage de 320 000 m3 maximum de sédiments par an (soit une augmentation de 6,7% par rapport à la précédente autorisation), avec un volume moyen annuel sollicité de 270 000 m3 sur la période totale de l’autorisation (soit une augmentation de 8 %). Cette augmentation des volumes à draguer est liée à l’extension des zones générées par le projet Port Horizon 2025. 

Zones de dragages d'entretien demandées - Grand port maritime La Rochelle / Dossier de demande d'autorisation PALR

Zones de dragages d'entretien demandées - Grand port maritime La Rochelle / Dossier de demande d'autorisation PALR

Dossier de demande d'autorisation Port Atlantique La Rochelle

Zones de dragages d'entretien demandées - Grand port maritime La Rochelle / Dossier de demande d'autorisation PALR

Dossier de demande d'autorisation Port Atlantique La Rochelle

Zone d'immersion du Lavardin - Dossier de demande d'autorisation PALR

Zone d'immersion du Lavardin - Dossier de demande d'autorisation PALR

Port Atlantique La Rochelle

Zone d'immersion du Lavardin - Dossier de demande d'autorisation PALR

Port Atlantique La Rochelle

Pour effectuer ces travaux, PALR prévoit de maintenir les techniques de dragage et d’immersion déjà utilisées avec notamment une drague aspiratrice en marche. Quant au clapage des sédiments dont la qualité est compatible avec l’immersion, il sera réalisé sur la zone de 78,5 hectares (cercle de 1km de diamètre) du Lavardin, site dispersif où les sédiments sont rejetés avant de se disperser hors du périmètre, dans sa zone d’influence.

Grand port maritime de La Rochelle
Grand port maritime de La Rochelle

Michel Bernard - La Rochelle Université / OFB

Les incidences des travaux et l’avis du conseil de gestion du Parc

Au regard du dossier complet du pétitionnaire, de la note technique du Parc (basée sur la pertinence du dossier vis-à-vis des enjeux environnementaux, de l’impact potentiel du projet et de sa compatibilité avec les objectifs du plan de gestion), et des éclairages apportés par les personnalités qualifiées du conseil de gestion, l’assemblée a rendu un avis conforme favorable, assorti de réserves et de prescriptions.

Concernant les réserves*, il est demandé au pétitionnaire de renforcer les suivis biosédimentaires et halieutiques afin d’assurer la robustesse des résultats et d’évaluer les impacts des clapages, et pour que le port puisse, si nécessaire, faire évoluer ses pratiques ou les mesures ERC (Eviter, réduire, compenser).

Quant aux prescriptions*, il est demandé :
1/ D’améliorer les pratiques de dragages visant à réduire les effets sur le milieu marin
Le PALR est engagé avec le Conseil départemental de Charente-Maritime et le port de plaisance de La Rochelle dans la réalisation d’un schéma territorialisé des dragages à l’échelle de la mer des pertuis. À ce travail, sont associés les services de l’État (DDTM de la Charente-Maritime) et l’équipe du Parc naturel marin. Ce schéma a pour objectifs de guider les acteurs portuaires vers une meilleure prise en compte des enjeux environnementaux et des effets de l’activité de dragage sur le milieu marin de la mer des Pertuis. Si ce schéma venait mettre en exergue certains enjeux ou nouvelles pratiques favorables à l’environnement, PALR devra en tenir compte dans un délai de 2 ans.

2/ Renforcer les suivis de la nourricerie de sole
La zone de clapage du Lavardin est au cœur d’une zone de nourricerie de sole. Elle est placée au sein des secteurs de plus fortes concentrations de juvéniles. Or à ce stade, les effets des clapages et de l’augmentation des volumes clapés ne sont pas suffisamment étayés pour définir si la zone fonctionnelle est altérée par les dépôts induits dans la zone de clapage et aux alentours.
Il est donc demandé au pétitionnaire de renforcer les suivis et analyses qui en sont faites afin de mieux mesurer les impacts dans la zone de clapage et sa zone d’influence.
Si dans le cadre de cette mesure, les effets des immersions sur l’habitat de nourricerie sont démontrés, le pétitionnaire devra proposer une mesure adaptée.

*Les réserves : compléments devant être apportés au dossier de demande d’autorisation afin de préciser des éléments figurant dans le dossier et de nature à modifier la décision. Les réserves doivent être levées avant la prise de l’arrêté d’autorisation.
*Les prescriptions : éléments figurant dans l’arrêté d’autorisation qui devront être mis en œuvre par le pétitionnaire avant, durant et après le projet, afin de s’assurer que les suivis, les méthodes déployées pour réaliser le projet etc. seront de nature à limiter, réduire et/ou compenser effectivement les impacts identifiés.

Barges à queue noire dans le fier d'Ars
Barges à queue noire dans le fier d'Ars

Raphaël Leprince / OFB

Pourquoi des zones de protection forte dans le Parc ?

La protection forte : une reconnaissance de niveau ministériel, issue de politiques publiques européennes et nationales
La Stratégie nationale pour les aires protégées 2021-2030 a pour objectif de couvrir 30% du territoire français par un réseau d’aires protégées, dont 10 % en protection forte.
Le décret n°2022-527 du 12 avril 2022 définit la notion de protection forte et les modalités de mise en œuvre de cette protection forte.

La protection forte est une reconnaissance de secteurs où la biodiversité est qualifiée de remarquable et où la règlementation garantit la suppression ou la réduction significative des pressions.

La territorialisation en mer de la stratégie nationale est prévue via les documents stratégiques de façade (DSF) et les parcs naturels marins y sont identifiés comme étant des périmètres propices à la mise en place des ZPF. Ainsi, le Parc naturel marin de l’estuaire de la Gironde et de la mer des Pertuis traduit cette politique nationale à l’échelle de son territoire, en coordination avec d’autres acteurs clés. 

Les travaux menés par le Parc
Un travail a été réalisé à l’échelle du Parc, en coordination étroite avec les gestionnaires d’aires marines protégées de son territoire, les services de l’Etat et les établissements publics associés, pour analyser au cas par cas les secteurs correspondant aux critères de protection forte. 

Cet état des lieux a permis de localiser les écosystèmes visés par les ZPF (estrans rocheux, vasières profondes, habitats particuliers, et zones fonctionnelles des oiseaux d’eau côtiers, et zones fonctionnelles estuariennes des amphihalins), d’identifier les principales pressions exercées par les activités, et d’analyser les réglementations de ces activités qui garantissent la diminution significative ou la suppression des principales pressions humaines sur ces écosystèmes.

4 secteurs du Parc répondent, en l’état, aux critères de définition de protection forte
Toutes ces données croisées ont permis d’identifier 4 secteurs respectant en l’état, c’est-à-dire sans besoin de réglementation complémentaire, les critères du décret : 

  • 1 secteur correspond à la partie marine de la Réserve naturelle nationale (RNN) de Lilleau des Niges (0,65 km2)
  • 3 secteurs sont situés dans le périmètre de la Réserve naturelle nationale de Moëze-Oléron : secteur de la « réserve intégrale ‘C’ Moëze » (2,29 km2), secteur « Arceau-Baudissière » (0,68 km2),secteur « Baudissière-Le Château » (5,46 km2)

La surface totale de ces 4 secteurs est de 8,99 km2, soit 0,14% de la surface totale du Parc et 0,3% de la surface des écosystèmes prioritairement visés par la démarche ZPF dans le Parc.

Propositions soumises au débat du conseil de gestion

Le cadre réglementaire de la protection forte et les 4 secteurs respectant en l’état les critères de protection forte ont été présentés à l’ensemble des membres du conseil de gestion. Ceux-ci ont décidé de proposer à la reconnaissance comme zone de protection forte la partie marine de la Réserve naturelle nationale de Lilleau des Niges, soit 65 hectares. Concernant les prochaines étapes, le Préfet maritime pourra soumettre cette proposition à la consultation du conseil maritime de façade (CMF) Sud Atlantique, et la transmettre au Ministère qui attribuera (ou pas) la reconnaissance.

Quant aux 3 secteurs localisés dans le périmètre marin de la Réserve naturelle nationale Moëze-Oléron, la décision de transmission est reportée dans l’attente de l’avis du comité consultatif de la Réserve en question, nécessaire pour éclairer la décision du conseil de gestion.

Une phase de réflexion débutera en 2023 et portera sur la reconnaissance de nouvelles zones de protection forte : avec quelles ambitions et selon quels objectifs fixés par le conseil de gestion ?